Page:Aimard - Le forestier.djvu/18

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
19
Le Forestier, par Gustave Aimard

— Eh ! compère ! dit en riant un des bandits, ce n’est pas d’un bon chasseur, de venir ainsi au secours de la bête lorsqu’elle est aux abois et qu’il ne tant plus qu’un coup pour la mettre à bas ; laissez-nous terminer notre besogne, ce sera bientôt fait.

— Non, par le Dieu vivant ! s’écria résolument le forestier, à moins que vous ne m’abattiez, moi aussi.

— Allons, allons, No Santiago, laissez-nous faire ; que vous importe cet homme que vous ne connaissez pas ?

— C’est un de mes semblables en danger de mort, cela me suffit, je veux le sauver.

— Prenez garde, No Santiago, nous avons un proverbe terrible dans la montagne : l’étranger que l’on épargne est un ennemi implacable qu’on se fait.

— Il en sera ce que Dieu décidera, répondit généreusement le forestier, qui cependant avait senti un frisson de terreur glacer son cœur, mais je défendrai cet homme au péril de ma vie.

Il y eut un silence de deux ou trois secondes.

— Puisque vous l’exigez, No Santiago, reprit enfin un des bandits, nous nous retirons ; nous ne voulons pas vous refuser la première demande que vous nous adressez ; mais, je vous le répète, prenez garde à cet homme. Adieu ! et sans rancune, No Santiago. Allons ! en route, vous autres ajouta-t-il en s’adressant à ses compagnons.

Les bandits disparurent dans les ténèbres, et le forestier demeura seul auprès de l’homme qu’il avait si miraculeusement sauvé.


II

Quelques heures peu agréables dans la sierra de Tolède


L’inconnu, accablé par la fatigue et peut-être un peu aussi par l’émotion qu’il avait éprouvée lors de la lutte inégale qu’il avait si bravement soutenue contre les bandits, s’était laissé choir sur le sol, où il gisait presque sans connaissance.

(Liv. 3)