Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/122

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dans les hommes qui m’entourent. Sebastian, dont vous connaissez le caractère atrabilaire et soupçonneux, m’avait dit contre vous certaines choses fort graves, qu’il est inutile de répéter maintenant, et dont il s’était vanté de me fournir les preuves, si je lui laissais carte blanche. J’y consentis ; vous savez le reste.

— Ainsi, Sebastian m’avait accusé de trahison ?

— Positivement, oui, mon ami.

— Je ne puis vous en vouloir, Mayor ; tout autre à votre place aurait agi comme vous l’avez fait, mais peut-être n’aurait pas reconnu son erreur aussi franchement que vous l’avez reconnue tout à l’heure.

— Merci, compagnon ; maintenant c’est entre nous à la vie et à la mort.

— Vous avez dit le mot, Mayor. Bientôt, croyez-le bien, vous ne conserverez plus aucun doute sur mon compte.

— Je n’en conserve plus, mon ami ; donc, brisons là et continuez, je vous prie.

— Soit, Mayor. D’ailleurs, avec le temps tous les nuages se dissipent, et la vérité se découvre, quoi qu’on fasse pour l’empêcher. Je reprends : Sebastian fut mis dans la prison de l’hacienda ; mais bientôt Cœur-Sombre et ses amis reconnurent que le prisonnier qu’ils avaient fait était très gênant pour eux ; il s’agissait de se débarrasser de lui, soit en le tuant, soit en le livrant aux Français. Mais aucun de ces moyens n’était praticable : les Français ne pouvaient se charger, sans ordre d’extradition, d’un prisonnier fait sur le territoire des États-Unis ; d’un autre côté, tuer cet homme dans l’hacienda était impossible ; don Cristoval se serait attiré de la part des autorités américaines un procès criminel.

— Oui, le cas était embarrassant. Comment s’en sont-ils tirés ?

— Par un biais assez adroit ; le Cœur-Sombre apprit par hasard qu’une troupe de coureurs des bois était arrivée pour les grandes chasses d’hiver et campait à quelques lieues de l’hacienda, au brûlis de la Hulotte bleue.

— Oui, j’ai entendu parler de cette troupe. Calaveras