Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/152

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De plus, et pour donner un autre cours aux idées des aventuriers, le Mayor fit annoncer, à l’heure du dîner, que l’on se préparât à se mettre en marche, le camp devant être abandonné une heure après le coucher du soleil, afin de rapprocher la cuadrilla du point de la frontière où la surprise devait être exécutée.

Ces diverses mesures avaient été adoptées par le Mayor dans un conseil secret tenu entre lui, Navaja et Felitz Oyandi, et dont il importe que nous fassions connaître les incidents les plus importants.

Rentré dans le jacal, nous ne dirons pas avec ses deux amis — le Mayor n’avait pas d’amis, mais seulement des complices — n’ayant plus à se contraindre, il avait laissé tomber son masque ; pendant près d’une heure, il resta plongé dans un silence farouche ; vainement Navaja et Felitz Oyandi essayèrent de le lui faire rompre par des raisonnements plus ou moins bien adaptés aux circonstances dans lesquels ils se trouvaient tous placés.

Cependant, soit que ces raisonnements eussent enfin produit un certain effet sur lui, soit — ce qui est plus probable — que remis de ce rude assaut, son esprit eût repris son élasticité habituelle, le Mayor retrouva un calme relatif, et il consentit à aviser aux moyens de parer aux effets du coup qui lui avait été si rudement porté.

Lorsque les premières mesures indispensables furent prises pour calmer l’effervescence de mauvais augure qui régnait dans le camp, le Mayor demanda nettement à ses deux conseillers quelle conduite il était à leur avis convenable de tenir dans des circonstances aussi difficiles.

— J’espère, répondit Navaja en souriant, que vous n’avez pas l’intention de vous rendre à l’assignation plus que hautaine du juge Lynch ?

— Pas plus que je n’obéirai aux autres insolentes injonctions que ces drôles ont eu l’audace de m’intimer. Bien leur en a pris de se faire soutenir par des forces nombreuses et que j’aie flairé le piège ; sans cela, ils ne seraient