Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/188

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rien soupçonner de ce qui va se passer ; soyez charmant avec vos invités, occupez-les n’importe comment, voilà votre rôle, il est facile ; quant à moi, laissez-moi faire. Le moment venu d’agir vigoureusement, je vous avertirai.

— Vous me le promettez ?

— Sur l’honneur !

— Allons, c’est convenu, puisque vous le voulez absolument ; quelle singulière nuit de noce vous allez passer !

— Bah ! je sacrifie celle-ci pour que les autres soient meilleures, répondit-il en riant.

Ils rentrèrent alors dans la salle à manger et reprirent leurs places à table.

La joie était à son comble, tout le monde riait, chantait, bavardait à qui mieux mieux.

On ne s’entendait plus ; excepté Denizà et la comtesse de Valenfleurs, personne ne s’était aperçu de la longue absence de nos personnages.

Julian profita de l’inattention générale pour causer avec sa femme et lui faire certaines confidences, maintenant indispensables.

— Ma chère Denizà, lui dit-il d’une voix contenue, il est de mon devoir de vous expliquer ce que ma conduite a eu, à vos yeux, d’extraordinaire depuis ce matin. Vous n’êtes pas une femme ordinaire, ma bien-aimée ; vous avez un esprit trop élevé et un cœur trop vaillant pour qu’il me soit nécessaire de prendre avec vous certains ménagements dont, avec toute autre femme que vous, je serais contraint d’user ; d’ailleurs, je vous ai promis de ne plus avoir de secrets pour vous ; je dois donc, et je veux tout vous dire, franchement et loyalement.

— Je vous comprends, mon ami, répondit la jeune femme toujours souriante : un danger nous menace, n’est-ce pas ?

— Un danger terrible ; c’est ce danger qui m’a, il y a un mois, ramené ici, où je ne savais pas avoir le bonheur de vous retrouver ; ce danger menace surtout nos hôtes : don Cristoval, sa femme et ses enfants. Deux bandits redoutables ont juré de les assassiner et de les dé-