Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/35

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donna plus d’autre signe de vie que de souffler comme un phoque.

Sur l’ordre de Julian, le mayordomo se débarrassa en un tour de main de son zarape et en enveloppa le bandit de façon à le rendre sourd et aveugle.

Cela fait, les chasseurs le laissèrent étendu provisoirement dans l’endroit où il avait été pris, et ils regagnèrent le couvert.

Ils s’arrêtèrent, par surcroît de précaution, hors de la portée de la voix.

Le señor Navaja les avait suivis.

Tous trois s’assirent alors sur le gazon, mais de façon cependant à ne pas perdre de vue leur redoutable prisonnier.

Le soleil se levait.

— Caraï ! s’écria en riant le señor Navaja, c’est affaire à vous, Cœur-Sombre ; vous n’avez pas votre pareil dans la savane pour dresser une embuscade. Vous avez bien fait de prendre ainsi ce misérable à l’improviste, car c’est un rude mâtin, et si vous lui en aviez donné le temps, il vous aurait donne fort à faire.

— Quel est cet homme ? le connaissez-vous ? lui demanda Julian.

— Certes, je le connais, et il me connaît aussi : c’est l’âme damnée du Mayor ; il est Français, je le crois Basque.

— Ah ! fit Julian en tressaillant, qui vous fait supposer cela ?

— Voici : lorsque le Mayor, Calaveras et Sébastian, — cet homme se nomme Sebastian, c’est un ancien matelot, — lorsque, dis-je, ces trois hommes causent ensemble, ils n’emploient jamais ni le français ni l’espagnol, mais un jargon incompréhensible, que je crois avoir entendu bredouiller dans les Pyrénées par les naturels du pays, à une époque, ajouta-t-il avec un sourire étouffé, où je ne pensais guère à traverser la mer et à passer en Amérique !

— Vous ne savez rien de particulier sur le compte de cet homme ?