Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/376

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— Ah ! alors, c’est autre chose ; vous faites de belles affaires, à ce qu’il paraît…

— Moi, non pas, je vis tranquille avec le peu que je possède.

— Hum ! le peu !… Enfin, passons ; cependant, cette somme de quatre cent mille francs ?

— Cinq cent mille ; j’ai remis cette nuit cent mille francs à ce même drôle.

— Vous voyez bien que vous faites des affaires, reprit le Mayor en allumant un cigare.

— Non pas, s’il vous plaît, cher ami ; j’ai payé, c’est vrai, mais pour votre compte.

— Hein ? que dites-vous donc là ! fit-il, l’allumette d’une main et le cigare de l’autre.

— Dam ! la vérité ; avez-vous donc perdu la mémoire ?

— Non, certes, mais une si grosse somme…

— Eh ! dit Felitz Oyandi avec son ricanement habituel, vous n’en serez pas quitte à si bon marché ; cela coûte gros pour lever une armée.

— Enfin, si nous réussissons, ce ne sera que demi-mal, dit philosophiquement le Mayor.

— Oui, si nous réussissons ; mais je crains bien que cette fois encore nous ne payions les pots cassés, et cela par votre faute, comme toujours.

— Bon ! pourquoi cela ?

— N’est-ce pas vous qui avez insisté pour me faire traiter avec le Loupeur ?

— Certainement ; cet homme est le chef avoué de tous les malandrins de Paris.

— C’est vrai ; mais connaissez-vous bien cet homme !

— Je le connais pour un bandit de la pire espèce, très intelligent, dont l’esprit est rempli de ressources, adoré de tous ces drôles qui se sont volontairement placés sous ses ordres. Je me suis trouvé trois ou quatre fois avec lui sans qu’il me connût. Il me croyait un des siens arrivant à Paris après s’être évadé de Cayenne.

— Êtes-vous bien sûr de ne pas être connu de lui ?