Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/425

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aujourd’hui, se défendait en riant et en plaisantant, et s’échappait de la meilleure grâce du monde de tous ces filets plus ou moins adroitement tendus.

Du reste, il était bon convive, beau joueur, excellent camarade, toujours prêt à obliger dans certaines limites, gai, spirituel, railleur sans amertume ni méchanceté ; tirant l’épée comme Saint-Georges, le pistolet comme Monte-Christo, montant à cheval comme un centaure ; il ne disait jamais de mal de personne, pas même des femmes.

Que pouvait-on exiger de plus de lui ?

Quelques jours après la promenade du bois de Boulogne, dont nous avons rendu compte au lecteur, Armand pénétra à l’improviste, vers deux heures de l’après-dîner, dans le salon d’études où, selon sa coutume, sa mère se tenait en compagnie des deux jeunes filles.

Dès que madame de Valenfleurs aperçut son fils, elle fit un signe, perceptible seulement pour miss Lucy Gordon.

La jeune fille se souvint aussitôt que le courrier des États-Unis partait le soir même, et qu’elle avait à écrire à sa mère ; elle demanda à la comtesse la permission de remonter dans son appartement, permission que la comtesse lui accorda, bien entendu, en souriant.

— Ah ça ! ma mère, dit gaiement le jeune homme, serait-ce moi, par hasard, qui mets en fuite cette charmante miss Lucy Gordon ?

— À peu près, mon fils, répondit la comtesse sur le même ton. J’ai à vous entretenir sérieusement, Armand : j’ai pensé qu’une étrangère, si intime qu’elle fut à certains titres dans la maison, ne devait pas cependant assister à notre conversation. Voilà pourquoi j’ai renvoyé miss Lucy Gordon.

— Tout ce que vous faites est bien fait, ma mère, répondit le jeune homme en lui baisant respectueusement la main. Je suis à vos ordres ; j’écouterai toujours avec déférence ce qu’il vous plaira de me dire. Parlez donc, je vous en prie, ma mère. De quoi s’agit-il ?