Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/6

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que, effectivement, ils semblent passer leur vie entière sur leur selle, galopant sans cesse par monts et par vaux, par tous les temps et à toutes les heures de nuit et de jour ; buvant, mangeant et dormant à cheval, et franchissant des espaces considérables sans jamais laisser voir aucune fatigue ; durs aux autres comme à eux-mêmes, dans l’exercice de leurs rudes et difficiles fonctions ; mais toujours profondément respectés et même aimés de ces vaqueros, tigreros et gardiens du ganado, natures indomptables et plus qu’à demi-sauvages qu’ils ont sous leurs ordres.

On se fera une idée de l’importance des mayordomos, quand on saura ce que sont les haciendas, ces immenses exploitations agricoles où s’exploite en grand non seulement tout ce qui tient aux produits du sol : blé, alfa, maïs, enfin tout ce qui a trait à l’agriculture, mais encore l’élevage en grand des chevaux et des bestiaux, bœufs, moutons, porcs, etc., dont les troupeaux presque innombrables, connus sous le nom générique de ganado, sont disséminés et paissent en liberté sous la garde de quelques vaqueros, sur un espace souvent plus étendu qu’un de nos départements français.

Le mayordomo, seul responsable de toutes ces richesses éparpillées sur tous les points, est contraint de galoper sans cesse du Nord au Sud et de l’Est à l’Ouest, pour surveiller hommes et animaux, et maintenir partout l’ordre le plus parfait ; ce qu’ils font, du reste, avec une énergie et une intelligence au-dessus de tout éloge.

Malgré l’heure avancée, le mayordomo rentrait d’une longue course au dehors, précisément au moment où don Cristoval de Cardenas se mettait à sa recherche.

— Caballeros, dit l’haciendero d’un ton de bonne humeur, je vous présente ño Ignacio, un autre moi-même, mon serviteur et mon ami.

— Je suis entièrement à vos ordres, caballeros, dit le mayordomo en saluant. Mais, señor don Cristoval, cette présentation était inutile. J’ai l’honneur de connaître depuis longtemps ces deux caballeros, ajouta-t-il en échangeant une cordiale poignée de main avec les chasseurs ;