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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

païens reculeront-ils s’ils se voient chaudement reçus ; après cela, qui sait s’ils nous attaqueront ?

— Hum ! les démons sont rusés, ils savent fort bien combien cette maison renferme de monde ; ne comptez pas qu’ils se retirent avant de s’en être emparés.

— Eh bien ! s’écria-t-elle résolument, à la grâce de Dieu ; nous mourrons bravement en combattant, au lieu de nous laisser prendre lâchement et de devenir les esclaves de ces misérables, sans cœur et sans pitié.

— Soit donc, répondit le métis, électrisé par les enthousiastes paroles de sa maîtresse, bataille ! Vous savez, señorita, qu’un combat ne me fait pas peur ; que les païens se tiennent bien, car s’ils n’y prennent garde, je pourrais bien leur jouer un tour dont ils se souviendront longtemps !

La conversation en resta là provisoirement, vu l’obligation dans laquelle se trouvaient nos deux personnages de préparer leurs moyens de défense : ce qu’ils firent avec une célérité et une intelligence qui témoignaient que ce n’était pas la première fois qu’ils se trouvaient dans une aussi critique position.

Que le lecteur ne s’étonne pas de l’héroïsme viril déployé en cette circonstance par doña Carmela : sur les frontières, où l’on est sans cesse exposé aux incursions des Indiens et des maraudeurs de toutes sortes, les femmes combattent à côté des hommes, et, oubliant la faiblesse de leur sexe, elles savent, dans l’occasion, se montrer aussi braves que leurs frères et leurs maris.

Carmela ne s’était pas trompée ; c’était bien un