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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

d’hui au moins aussi grossiers et aussi brutaux que l’étaient leurs ancêtres.

Il est facile d’imaginer l’étrange quantité de légendes de sorciers, de fantômes, etc., qui ont cours au Nord-Amérique. Combien ces légendes, conservées par la tradition, passant de bouche en bouche et se mêlant avec le temps les unes aux autres, ont dû s’accroître encore dans un pays où les aspects grandioses de la nature portent naturellement l’esprit à la rêverie et à la mélancolie.

Aussi John Davis, tout esprit fort qu’il se flattait d’être, ne laissait pas que de posséder comme tous ses compatriotes une forte dose de crédulité, et cet homme qui n’aurait sans doute pas reculé à la vue de plusieurs fusils dirigés sur sa poitrine se sentait frissonner de peur au bruit d’une feuille tombant la nuit sur son épaule.

Du reste, aussitôt que l’idée fut venue à John Davis que le Scalpeur-Blanc était un démon ou tout au moins un sorcier, il s’en empara, et cette supposition devint immédiatement pour lui un article de foi. Naturellement il se trouva immédiatement soulagé par cette découverte ; ses idées reprirent leur cours ordinaire, et la préoccupation qui tourmentait son esprit disparut comme par enchantement ; désormais son opinion était formée sur cet homme, et si une autre fois le hasard les remettait en présence il saurait comment agir envers lui.

Heureux d’avoir trouvé enfin cette solution, il releva gaîment la tête et promena un long regard investigateur autour de lui, afin de se rendre compte des parages qu’il traversait.

Il était à peu près au mileu d’une vaste plaine peu