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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

saisir un levier et faire rouler une caisse dans le précipice ; la seconde, soulevée à grand’peine, n’avait plus besoin que d’un dernier effort pour disparaître à son tour, lorsque tout à coup un hurra terrible fit lever la tête à l’officier.

Les rôdeurs de frontières accouraient, terribles, haletants comme des tigres altérés de carnage.

— Ah ! s’écria joyeusement Gregorio Felpa, le traître guide, en se précipitant en avant, au moins celle-là nous l’aurons !

— Tu mens, misérable, répondit le capitaine.

Et levant à deux mains la barre de fer, il brisa le crâne du soldat, qui tomba comme un bœuf assommé sans jeter un cri, sans pousser un soupir.

— À un autre, dit le capitaine en relevant le levier.

Un hurlement d’horreur s’éleva de la foule, qui hésita une minute.

Le capitaine baissa vivement son levier, et la caisse pencha sur le bord de l’abîme.

Ce mouvement rendit aux rôdeurs toute leur colère et toute leur rage.

— À mort ! à mort ! s’écrièrent-ils.

— Arrêtez ! dit le Jaguar en s’élançant en avant, et renversant tout ce qui s’opposait à son passage, que pas un de vous ne bouge : cet homme m’appartient.

À cette voix tous ces hommes s’arrêtèrent.

Le capitaine jeta son levier ; la dernière caisse venait de tomber à son tour au fond du précipice.

— Rendez-vous, capitaine Melendez, dit le Jaguar en s’avançant vers l’officier.

Celui-ci avait repris son sabre.