Page:Aimard - Les Trappeurs de l’Arkansas, 1858.djvu/40

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L’hacendero fit un geste.

— Mettez-vous à ma place, je suis juge criminel avant tout, on coupe une personne, un mauvais drôle, je vous le concède, mais un homme, quoique de la pire espèce ; l’assassin est connu, il traverse au galop la ville, en plein soleil, à la vue de tous, avec une effronterie incroyable, que devais-je faire ? me mettre à sa poursuite, je n’ai pas hésité.

— C’est vrai, murmura don Ramon en baissant la tête.

— Et mal m’en a pris, les coquins qui m’accompagnaient m’ont abandonné comme des poltrons au plus fort de l’orage pour se cacher je ne sais où ; pour comble de disgrâce, deux jaguars, de magnifiques bêtes du reste, se sont lancés à ma poursuite, ils me serraient de si près que je suis venu tomber comme une masse à votre porte ; j’en ai tué un, c’est vrai, mais l’autre était bien près de me happer lorsque vous m’êtes venu en aide. Pouvais-je après cela arrêter le fils de l’homme qui m’avait sauvé la vie au péril de la sienne ? c’eût été agir avec la plus noire ingratitude.

— Merci, encore une fois.

— Mais non, nous sommes quittes, voilà tout. Je ne parle pas des quelques milliers de piastres que vous m’avez donnés, puisqu’ils serviront à fermer la bouche à mes loups cerviers ; seulement, croyez-moi, don Ramon, surveillez votre fils, s’il retombait une