Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/113

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— Comme il vous plaira !

Le Mexicain retira alors son couteau de sa botte, et avec le pommeau, il en frappa la porte à trois reprises, en laissant un certain intervalle entre chaque coup.

Les chiens de l’azotea hurlèrent avec fureur à l’appel de don Pedro ; d’autres hurlements se firent entendre à l’intérieur de la maison, mêlés au bruit d’un pas lourd qui se rapprochait rapidement, et à la voix rauque d’un homme essayant d’apaiser les abois saccadés du chien, que probablement, il avait pour compagnon.

Il y eut un certain grincement de ferraille ; puis par l’entre-bâillement de la porte apparut d’abord une tête au visage chafouin, aux yeux torves et aux cheveux ébouriffés, et ensuite, une main armée d’une lanterne.

Nous disons que la porte s’entr’ouvrit seulement, parce que dans toutes les colonies espagnoles, les portes des maisons sont munies à l’intérieur d’une chaîne qui ne leur permet de s’ouvrir que d’un pied ; ou un pied et demi au plus ; précaution usitée pendant la nuit contre les voleurs, de tout temps fort nombreux dans ces régions si généreusement chauffées par le soleil.

Ce fut en hésitant, que l’homme à la mine chafouine, avança son gracieux visage dans l’entre-bâillement de la porte.

Après avoir au moyen de sa lanterne, cherché à reconnaître les arrivants, il leur dit d’une voix enrouée dont les intonations rauques ressemblaient à l’ébrouement d’un chien enrhumé, et que nous ne saurions mieux comparer qu’à la voix devenue typique de l’un de nos principaux journalistes parisiens actuels :

— Que le diable vous emporte, vous autres ! ne pouviez-vous pas rester tranquillement chez vous, au lieu de venir, à cette heure de nuit, troubler d’honnêtes gens dans leur demeure ?

— Allons, allons, tio matatrès, ne me reconnaissez-vous pas ? Je suis votre ami don Pedro Garcias, caraï ! j’ai droit à une bonne réception ainsi que les amis que j’amène ! ne nous laissez pas plus longtemps dehors ;