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— Frères ! dit-il d’une voix vibrante, faites-moi raison. Comme le disait tout à l’heure le beau Laurent, je bois à la prospérité de la flibuste.

— À la prospérité de la flibuste ! répétèrent les convives.

— Attendez, reprit le capitaine en tendant de nouveau son verre. Je bois à la France, notre mère commune, et à la liberté sur la mer, puisque la terre nous la refuse !

Cette santé fut accueillie par de frénétiques clameurs de joie.

— Et maintenant, reprit le capitaine en brisant brusquement son verre sur la table, je ne boirai plus. Frères, recevez mes adieux ; l’heure de la séparation a sonné, je pars ; dans un mois je serai de retour ou je serai mort.

— Pourquoi de telles pensées en ce moment, mon cher capitaine ? dit doucement M. d’Ogeron.

Ourson hocha la tête avec mélancolie.

— C’est vrai, monsieur, dit-il, j’ai tort ; je vous attriste tous et je n’aurais pas dû terminer ainsi un joyeux festin ; pardonnez-moi, Frères. En ce moment je joue ma vie sur un coup de dé ; toutes les chances me sont contraires, et, sur le point de vous quitter pour toujours peut-être, le souvenir de notre fraternelle amitié déchire mon cœur, s’il ne fait pas faiblir ma volonté.

— Pourquoi partir aujourd’hui ? dit Montbarts.