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de-Fer, David, Pierre Legrand, le Poletais, Drack, Rock le Brésilien, et tant d’autres Frères de la Côte, non moins illustres et non moins redoutables.

M. d’Ogeron, gouverneur, pour S. M. Louis XIV, de l’île de la Tortue et de la partie française de Saint-Domingue, occupait la place d’honneur ; il avait à sa droite le capitaine Ourson, à sa gauche Pierre Legrand, jeune homme de vingt-cinq ans, aux traits fins et distingués, le commandant en second de l’expédition projetée.

Quant aux autres boucaniers, ils s’étaient assis au hasard.

Une nuée d’engagés, pauvres diables à peine vêtus d’un caleçon et d’une chemise de toile en lambeaux tachée de graisse et de sang, circulait avec une prestesse et un silence de spectres autour des convives, faisant sans cesse passer les plats, les assiettes et les brocs de vin, que la plupart du temps, en manière de plaisanterie, les flibustiers leur jetaient à la tête, après les avoir vidés, bien entendu.

C’est que, dans l’opinion des Frères de la Côte, qui, pour la plupart, avaient fait ce rude apprentissage, un engagé n’était guère qu’une bête de somme, sur laquelle ils avaient le droit de vie et de mort, pendant les cinq longues années que durait son esclavage.

Le capitaine Ourson Tête-de-Fer, ainsi qu’on le nommait, faute de savoir son nom véritable, était à cette époque un homme de trente à trente-deux