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mer et jouer au monte, jouer au monte surtout.

Le jeu fait fureur au Pérou, comme dans toutes les autres colonies espagnoles, devenues aujourd’hui des républiques plus ou moins florissantes.

Après chaque croisière, Olivier et sa charmante compagne venaient secrètement au Chorrillo, espèce de terrain neutre, où Péruviens et Espagnols se faisaient à peu près bon visage, aux reflets chatoyants des onces d’or amoncelées sur les tables de jeu. Les jeunes mariés passaient au Chorrillo un mois, parfois davantage, auprès de don Diego Quiros et de doña Maria, puis ils s’envolaient comme des oiseaux de passage, emportant avec eux du bonheur pour toute leur croisière.

Olivier avait un fils ; ce fils, que père, mère, grand-père et grand’mère adoraient à qui mieux mieux, allait avoir trois ans il se nommait Napoléon !

Pourquoi Napoléon ?

C’est ce que nous allons expliquer, le plus clairement qu’il nous sera possible.

À cette époque, le grand nom de l’heureux conquérant de l’Europe remplissait le monde ; le martyr de Saint-Hélène, ainsi qu’on l’appelait, mort à peine depuis quelques années, était quelque chose de plus qu’un dieu ; la légende impériale se faisait de toutes les rancunes amassées contre l’ancien régime ; on avait, de parti pris, oublié la véritable histoire du héros posthume, pour ne se souvenir que de sa gloire et l’entourer d’une auréole ; l’heure où chaque chose devait être remise à sa place, et le conquérant glorifié ou honni, selon ses mérites ou ses erreurs, n’était