Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/280

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armés jusqu’aux dents et résolus escortaient les voyageurs.

Dans ce magnifique pays d’Espagne, où les brigands poussent sous chaque caillou de la route, il est bon de se mettre sur ses gardes et de ne pas trop compter sur la protection du gouvernement pour sa sûreté, les voleurs étant en général les amis et les associés des gendarmes.

Quelques jours avaient suffi à Olivier pour s’assurer que le marquis et la marquise n’étaient unis qu’à la surface, et qu’au fond leur intérieur n’était, en réalité, qu’un enfer.

Ce fut alors, dès le commencement du voyage, qu’Olivier fut initié à son rôle de confident et de consolateur.

La marquise avait besoin d’un prétexte ; la présence continuelle de ses gens la gênait : peut-être étaient-ils dans les intérêts de son mari, chargés par lui de l’épier. Elle attendait une occasion : le départ d’Olivier pour Cadix la lui offrit, elle la saisit au vol. Pendant un voyage de plusieurs jours, assis côte à côte dans une berline enlevée à toute course par des mules enragées, causant en français et parlant à demi-voix, elle pouvait tout dire sans crainte.

Doña Santa en était venue à éprouver une si réelle et une si confiante amitié pour son frère, qu’elle ne voulait plus avoir de secrets pour lui, qu’elle sentait le besoin impérieux de lui révéler ses souffrances les plus intimes, souffrances d’autant plus cruelles que, nous l’avons dit, elle adorait son mari.

Une chose surtout l’irritait au point de la rendre furieuse : c’était ce qu’elle nommait la duplicité