Page:Aimard - Par mer et par terre : le corsaire.djvu/369

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Huit mois s’écoulèrent ainsi, huit mois d’un bonheur complet, qui passèrent avec la rapidité d’un songe ; l’amour des deux jeunes gens, loin de diminuer par la possession, augmentait au contraire chaque jour. C’était bien véritablement cet amour du cœur, si rare, quoi qu’on en dise, à trouver sur la terre, car il rapproche du ciel.

Mais enfin l’heure sonna où il fallut songer au départ.

Depuis deux jours, le Hasard était mouillé sur rade, de retour de sa dernière et fructueuse croisière ; Ivon Lebris était venu saluer son capitaine et avait eu avec lui une longue et importante conversation.

Il fallut se préparer à une séparation douloureuse ; les derniers adieux furent déchirants.

Mais, dès le premier jour, doña Dolorès avait nettement déclaré qu’elle ne se séparerait jamais de son mari, qu’elle le suivrait partout ; il fallut se résigner. Bien que prévenus de longue date, don Diego et doña Maria sentirent leur cœur se briser, en serrant pour la dernière fois leur fille entre leurs bras.

La jeune femme fut enlevée par son mari, presque mourante, et placée dans la baleinière qui devait la transporter à bord du corsaire.

Le lendemain, au lever du soleil, le Hasard appareilla et quitta la rade de Valparaiso, toutes voiles dehors.

Tant que la côte fut visible, les regards de doña Dolorès demeurèrent opiniâtrement fixés sur cette terre qu’elle abandonnait peut-être pour toujours.

Lorsque tout se fut enfin effacé derrière les