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PHILOSOPHIE DE KANT

chef-d’œuvre de l’analyse philosophique, assurée de ses principes et qui met de l’ordre dans ses idées, pour la beauté et pour la joie.

Je n’ai rien à vous apprendre, mon cher philosophe, au sujet de ces pages illustres ; je vous invite seulement à les mieux comprendre par rapport à toute la science du sujet. Voyez quelle vive lumière résulte de la célèbre formule : « Le beau, c’est ce qui plaît sans concept ». Aussitôt, l’on comprend que la beauté n’a pas de preuves ; que les raisons n’y sont pour rien ; que le beau est immédiat et indépendant du concept de la chose. Ce qui prouve d’abord qu’il y a des certitudes sans preuves ; prouve-t-on qu’une musique est belle ? Non ; mais on la fait entendre. Évidemment il y a de la finalité dans la beauté. La beauté est faite pour nous, elle nous convient ; ce qui vient expliquer la troisième définition, que la beauté enferme une finalité, mais sans aucune représentation de fin. Cette précaution nous rappelle la lettre précédente, c’est à savoir qu’il ne s’agit pas de comprendre la finalité, mais de la vouloir. Nul n’est forcé de