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LA PATRIE EN DANGER


patriotes ». Si on en croyait Barbaroux, il aurait songé à quitter Paris pour aller se réfugier à Marseille. Sa solution à lui n’est plus à ce moment la dictature, mais une solution de guerre. Il conseille, le 18 juillet, de s’emparer du roi et de sa famille et de les garder en otages, en menaçant de les égorger si l’ennemi envahissait la France.

Cependant l’idée lancée par Torné trouva de l’écho. Elle était dans l’air. Déjà Anacharsis Cloots avait pro- posé, dans les Annales patriotiques du 18 juin, d’élire « le vénérable Roland » régent du royaume. « Quant à Louis XVI, disait Cloots, on lui assignerait une pension et une maison de retraite où il serait tenu de rester six mois. » Le Journal général de l’Europe conseilla, le 24 juillet, de nommer « dictateurs pour la durée de la guerre : Roland, Servan et Petion, en les imvestissant de tous les pouvoirs que donne la Constitution au pouvoir exécutif, Ces Messieurs nommeront les ministres, lesquels réunis à eux formeront le conseil suprême et pourront admettre au ministère les membres de l’Assemblée Constituante aussi bien que les députés actuels ». La Législative s’ajournerait jusqu’à la paix et les dictateurs, en lui communiquant la paix, lui rendraient compte de leur conduite.

Cet article ne passa pas inaperçu. Il fut tiré en brochure et affiché sous le titre : Aperçu d’une grande mesure pour sauver la France. Le grand journal démocratique, Les Révolutions de Paris, le réfuta en exprimant l’espoir que Roland, Petion et Servan refuseraient la dictature. Il s’opposa à l’ajournement de l’Assemblée qui comblerait les vœux du roi. Mais le vaniteux Petion, grisé par les démonstrations de popularité que lui avait