Page:Alberti- De la statue et de la peinture, 1868.djvu/185

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des lèvres minces, et, finalement, chaque membre aura quelque chose de particulier plus ou moins saillant, ou variera du tout au tout. Ne voyons-nous pas, en effet, que les mêmes membres sont chez nous, étant enfants, arrondis, comme faits au tour et très-légers, tandis qu’avec l’âge nous les prenons moins unis et presque anguleux ? Celui qui étudie la peinture tirera toutes ces observations de la nature prise sur le fait ; il méditera souvent en lui-même sur les règles en vertu desquelles ces choses existent. Car il examinera le torse d’une personne assise et comme quoi ses jambes s’en vont doucement en pente. Il remarquera la face entière et l’attitude de celui qui se tient debout. Enfin, il n’y aura aucune partie dont il ignore l’office et la symétrie, ainsi que disent les Grecs.

Il est bon qu’il tienne à la ressemblance dans toutes les parties, mais aussi, et par-dessus tout, à la beauté. Car la beauté, dans la peinture, n’est pas une chose moins agréable que désirable. Démétrius, ce peintre ancien, affaiblit grandement sa gloire, parce qu’il fut plus jaloux d’exprimer la ressemblance que d’atteindre la beauté. Il faut donc choisir toutes les parties estimées des plus beaux corps. Il faut tout d’abord s’efforcer, par l’étude et par l’art, de comprendre et d’exprimer la beauté, encore que ce soit ce qu’il y a de plus difficile au monde, attendu que ses splendeurs ne sont pas réunies sur un même point, mais qu’elles sont rares et dispersées. Cependant il faut apporter tout son zèle à la rechercher et à la connaître. Celui