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DONATELLO.

des Frari à Venise, le Saint Jean et le Saint Jérôme de Faënza sont de dignes compagnons de tous les autres.

Mais le Gattamelata est un des grands jalons de la carrière. Il a, dans le calme autoritaire et dans la robuste apologie de la force, la même importance que les apôtres du Campanile dans l’affirmation des droits et des tourments de la pensée. Il est bien entendu que le prétexte lui-même n’est plus rien de nos jours, et que ce condottiere est profondément indifférent à l’histoire. L’artiste a dépassé d’un bond gigantesque la portée supposée de ce qu’on lui demandait, et son génie l’a induit à créer un emblème alors qu’on lui payait un portrait.

Venise avait, comme dit spirituellement M. Muntz, « décrété généreusement l’érection d’un monument à son ancien général, laissant à la veuve et au fils de celui-ci le soin d’en acquitter les frais ». Cette statue a nécessité, de la part de Donatello, des études très approfondies, nécessaires en cette occasion pour seconder la promptitude et la sûreté de son talent dans une tâche où il avait tout à créer, tout à retrouver tout au moins. C’était en effet la première grande statue équestre que l’Italie voyait ériger depuis l’antiquité. Les chevaux de saint Marc, les statues équestres qu’il avait naguère vues à Rome purent l’inspirer. Mais la statue de Gattamelata était en elle-même, pour le temps, une véritable invention. Sa nouveauté demeure et sa puissance n’a été égalée, dépassée peut-être, nous devons le reconnaître, que par le Colleone de Verrocchio. Cette dernière statue, il est vrai, conçue