Page:Alexandri - Les Doïnas, 1855.djvu/19

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seule que les efforts de la jeunesse moldo-valaque ont tendu bien longtemps. Plus d’un essai a été tenté dans tous les genres ; et, si le caractère général des créations de nos poëtes est celui de l’imitation étrangère, il existe pourtant d’honorables exceptions. M. Alexandri est la première. Nourri dans la lecture des chroniques roumanes et des poésies anciennes, il a eu seul le mérite de trouver le filon d’une mine riche de poésie nationale. Toutes ses créations sont une peinture fidèle des coutumes du pays, de sa situation morale et politique à l’époque qui précède immédiatement celle dans laquelle nous vivons aujourd’hui. Voyez ses Doïnas ; la plupart d’entre elles, la Strunga, le Chant des Brigands, André Popa sont autant de souvenirs des douleurs de l’homme qui, condamné à cette époque aux plus lourdes redevances et à la plus dégradante oppression, se réfugiait dans les bois. Mais tous ses héros des forêts sont intéressants et nobles. Vaillant et intrépide, jamais cruel, tendre et aimant, telle est la nature du Rouman, et telle nous la dépeint M. Alexandri.

Quant au mérite littéraire des poésies de M. Alexandri, je ne crois pas abuser de votre patience en appelant votre attention sur la Doïna, la vieille Kloantza, les Trois Archers, et quelques autres pièces du même genre. Je crois encore moins blesser la modestie du poëte, en traçant ici un parallèle entre les pièces que je viens de citer et les productions des plus grands poëtes lyriques polonais et allemands. Pour ne vous citer qu’un exemple, il existe parmi les poésies de Gœthe une ballade bien connue dans toutes les littératures, le Pêcheur :



« Und wie er sitzt, und wie er lauscht,
« Theilt sich die Flut empor,
« Aus dem bewegten Wasser rausht
« Ein feuchtes Weib hervor. »