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Page:Alexis de Tocqueville - De la démocratie en Amérique, Pagnerre, 1848, tome 1.djvu/14

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INTRODUCTION.

siècle les rapproche, et bientôt ils vont se toucher.

Et ceci n’est pas seulement particulier à la France. De quelque côté que nous jetions nos regards, nous apercevons la même révolution qui se continue dans tout l’univers chrétien.

Partout on a vu les divers incidents de la vie des peuples tourner au profit de la démocratie ; tous les hommes l’ont aidée de leurs efforts : ceux qui avaient en vue de concourir à ses succès et ceux qui ne songeaient point à la servir ; ceux qui ont combattu pour elle, et ceux mêmes qui se sont déclarés ses ennemis ; tous ont été poussés pêle-mêle dans la même voie, et tous ont travaillé en commun, les uns malgré eux, les autres à leur insu, aveugles instruments dans les mains de Dieu.

Le développement graduel de l’égalité des conditions est donc un fait providentiel, il en a les principaux caractères : il est universel, il est durable, il échappe chaque jour à la puissance humaine ; tous les événements, comme tous les hommes, servent à son développement.

Serait-il sage de croire qu’un mouvement social qui vient de si loin, pourra être suspendu par les efforts d’une génération ? Pense-t-on qu’après avoir détruit la féodalité et vaincu les rois, la démocratie reculera devant les bourgeois et les riches ? S’arrêtera-t-elle maintenant qu’elle est devenue si forte et ses adversaires si faibles ?