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GOUVERNEMENT FÉDÉRAL.


CRISE DE L’ÉLECTION.


On peut considérer le moment de l’élection du président comme un moment de crise nationale. — Pourquoi. — Passion du peuple. — Préoccupation du président. — Calme qui succède à l’agitation de l’élection.

J’ai dit dans quelles circonstances favorables se trouvaient les États-Unis pour l’adoption du système électif, et j’ai fait connaître les précautions qu’avaient prises les législateurs, afin d’en diminuer les dangers. Les Américains sont habitués à procéder à toutes sortes d’élections. L’expérience leur a appris à quel degré d’agitation ils peuvent parvenir et doivent s’arrêter. La vaste étendue de leur territoire et la dissémination des habitants y rend une collision entre les différents partis moins probable et moins périlleuse que partout ailleurs. Les circonstances politiques au milieu desquelles la nation s’est trouvée lors des élections n’ont jusqu’ici présenté aucun danger réel.

Cependant on peut encore considérer le moment de l’élection du président des États-Unis comme une époque de crise nationale.

L’influence qu’exerce le président sur la marche des affaires est sans doute faible et indirecte, mais elle s’étend sur la nation entière ; le choix du président n’importe que modérément à chaque citoyen, mais il importe à tous les citoyens. Or, un intérêt, quelque petit qu’il soit, prend un grand caractère d’importance, du moment qu’il devient un intérêt général.

Comparé à un roi d’Europe, le président a sans doute peu de moyens de se créer des partisans ; toutefois, les places dont il dispose sont en assez grand