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SUR LES SENTIMENTS DES AMÉRICAINS.

tude de l’association ; elle fait désirer de s’unir et apprend l’art de le faire à une foule d’hommes qui auraient toujours vécu seuls.

La politique ne fait pas seulement naître beaucoup d’associations, elle crée des associations très-vastes.

Dans la vie civile il est rare qu’un même intérêt attire naturellement vers une action commune un grand nombre d’hommes. Ce n’est qu’avec beaucoup d’art qu’on parvient à en créer un semblable.

En politique, l’occasion s’en offre à tous moments d’elle-même. Or, ce n’est que dans de grandes associations que la valeur générale de l’association se manifeste. Des citoyens individuellement faibles ne se font pas d’avance une idée claire de la force qu’ils peuvent acquérir en s’unissant ; il faut qu’on le leur montre pour qu’ils le comprennent. De là vient qu’il est souvent plus facile de rassembler dans un but commun une multitude que quelques hommes ; mille citoyens ne voient point l’intérêt qu’ils ont à s’unir ; dix mille l’aperçoivent. En politique, les hommes s’unissent pour de grandes entreprises, et le parti qu’ils tirent de l’association dans les affaires importantes leur enseigne, d’une manière pratique, l’intérêt qu’ils ont à s’en aider dans les moindres.

Une association politique tire à la fois une mul-