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PALAMAS. VIE


sentants de l’Athos. C'était une force considérable, avec laquelle le patriarche et l’empereur lui-même devaient compter.

On le vit bien au concile qui fut réuni, le 10 juin

1341, à Sainte-Sophie, sous la présidence de l’empereur. Barlaam fut sacrifié, comme on l’avait décidé à l’avance, et il n'échappa à une condamnation qu’en promettant de ne plus attaquer les moines. Grégoire Palamas, au contraire, sans obtenir l’approbation de sa théologie, sortit grandi de ce débat public. Mais voici que la mort d’Andronic III, survenue quatre jours après le concile (15 juin 1 131), retourna bientôt la situation contre les hésychastes par les complications politiques qu’elle amena. Sans doute, au mois d’roùt de la même année, un nouveau concile, présidé par l’ambitieux Jean Cantacuzène, tout dévoué à Palamas, donna raison à celui-ci contre les attaques d’Acindyne ; mais le patriarche refusa d’y paraître et d’en sanctionner les décrets. On arriva à une formule de conciliation trop favorable à Palamas et aux siens, que Jean Calt’cas eul la faiblesse de signer. Ce fut le tome synodal, ô cruvoSixoç TGfxoç, qui se présente comme le résultat du concile de juin 1341, mais qui paraît approuver indirectement la théologie palamite. Le patriarche crut pouvoir éluder cette conséquence en ajoutant, à la fin du document, la défense, sous peine d’excommunication, de soulever à l’avenir des questions dogmatiques. Dans sa pensée, le tome synodal laissait intacte la question de fond sur l’orthodoxie des opinions et des formules de Palamas. C'était une solution disciplin : ire destinée à clore le débat intempestivement soulevé par Barlaam. Mais trop de choses dans le décret favorisaient le théologien hésychâste pour que celui-ci résistât à la tentation de chanter victoire et d’enfreindre ainsi la prohibition patriarcale. II alla répétant partout que le concile avait approuvé sa doctrine et ses écrits. Mal lui en prit, car la guerre civile ayant éclaté, sur ces entrefaites, entre l’impératrice régente, Anne de Savoie, et le grand domestique, Jean Cantacuzène, Palamas, qui était l’ami de ce dernier, fut soupçonné d'être hostile au successeur légitime et impliqué dans une accusalion à la fois d’ordre religieux et d’ordre politique. Sommé de revenir à Constantinople, au début de

1342, il a une entrevue avec le patriarche, un peu avant Pâques. Jean Calécas essaie d’obtenir de lui la promesse de garder le silence sur sa théologie et d’obéir à la défense portée dans le tome synodal. Il se heurte à un refus. Quelques semaines plus tard, vers le mois de juin, Palamas. qui s’est retiré dans un couvent de la banlieue de Constantinople, est invité à comparaître devant un concile en vertu d’un décret impérial, que lui communiquent deux ecclésiastiques envoyés par le patriarche. Il fait répondre qu’il lui est impossible de se rendre seul au synode, mais qu’il est juste que les autres représentants du monachisme soient aussi convoqués. Puis il se relire à Héraclée. (/est là qu’on se saisit de lui, à l’automne de la même année 1342. Il est ramené à Constantinople, passe deux mois dans les dépendances de Sainte-Sophie, et en mai 1343, on l’interne au monastère de l’Incompréhensible, to’j 'AxaTa>.Y)71TOU, pour lui apprendre, dit Acindyne dans un écrit encore inédit, Cad. Monacensis græc. 223, fol. 54 v°, que Dieu est incompréhensible et ne saurait être vu par des yeux corporels.

Grégoire resta en prison jusqu'à l’arrivée de Jean Cantacuzène dans la capitale, en février 1347. C’est lui qui fut chargé de négocier la réconciliation entre le grand domestique et l’impératrice Anne. Il applaudit à la déposition de Jean Calécas. qui l’avait condamné et excommunié dans plusieurs synodes, et peu s’en fallut qu’il ne lui succédât sur le siège œcuménique. Après l'élection d’Isidore (17 mai 1347°), il

obtint du moins la métropole de Thessalonique. Mais bien des déboires l’attendaient dans l’exercice de sa charge pastorale. Repoussé une première fois par ses ouailles, en septembre 1347, il se retire à l’Athos, où il se rencontre avec le roi des Serbes, Etienne Douchan qui, n’ayant pas réussi à l’attirer dans ses États par les promesses les plus alléchantes, le contraint, du moins, de lui servir d’ambassadeur auprès de la cour de Constantinople. On le retrouve donc dans la capitale, à l’automne, de 1348. Au début de 1349, il renouvelle sa tentative sur Thessalonique, qui lui ferme de nouveau ses portes. C’est alors que, sur l’avis de la Grande Église, il se retire dans l'île de Lemnos. Il y reste jusqu'à la prise de la capitale macédonienne par Cantacuzène (1350), et c’est alors seulement qu’il peut prendre possession de son siège.

Ses pérégrinations étaient loin d'être finies. En janvier 1351, il est de nouveau à Constantinople, et en juillet de la même année, il paraît au grand concile qui consacre sa victoire sur Barlaam et Acindyne et fait de sa théologie la doctrine officielle de l'Église byzantine. Quand il veut rentrer à Thessalonique trois mois après, l’empereur Jean Y. brouillé avec Cantacuzène, lui en interdit l’entrée, et il est obligé de nouveau de se réfugier à l’Athos. Au bout de trois mois, il peut regagner sa ville épiscopale (1352). En 1353, un.e longue et grave « maladie d’entrailles » le conduit aux portes du tombeau. Il est à peine rétabli, qu’on l’appelle à Constantinople pour aider à la réconciliation de Jean V et de Cantacuzène. Mais le bateau qui le porte aux rives du Bosphore est pris par des corsaires turcs. Les infidèles s’emparent de ses bagages, le dépouillent de ses habits sacerdotaux, le réduisent en esclavage et lui font subir les plus honteuses avanies. Débarqué à Lampsaque, il est conduit successivement à Brousse et à Nicée. A plusieurs reprises, il a l’occasion d’exposer aux musulmans les mystères de la Trinité et de l’Incarnation, comme il le raconte lui-même dans une lettre adressée à son Église, si toutefois la pièce est authentique. Enfin, au bout d’un an, des Serbes charitables paient sa rançon et le délivrent. Il arrive à Constantinople au moment où Jean V vient d’y remplacer Jean Cantacuzène, devenu moine, et où Calliste est monté sur le siège patriarcal pour la seconde fois (1355). L’heure est critique pour les palamites. Les condamnés du concile de 1351 ont recouvré leur liberté, et Jean V est assez mal disposé à l'égard des amis de son ancien rival. Il ne veut cependant rien brusquer, et comme il négocie une entente avec le pape, il cherche à se renseigner sur la quere "e qui divise l'Église byzantine en deux factions ennemies. Il profite donc de la présence de Palamas pour le mettre aux prises avec le grand adversaire des palamites, Nicéphore Grégoras. Le légat pontifical. Paul, évêque de Smyrne, assiste à la conférence contradictoire et veut aussi connaître la doctrine nouvelle. Les relations qui nous en sont parvenues ne sont pas concordantes. Il semble que les deux protagonistes, en discutant sur Dieu et ses attributs, aient eu tour à tour leurs moments d’embarras et de silence. Le résultat fut que l’empereur se désintéressa personnellement de la question ; mais la théologie de Palamas resta la doctrine officielle de l'Église byzantine. On l’avait déjà incorporée, en 1352, au Synodicon du dimanche de l’orthodoxie.

Les pourparlers unionistes qui sont entamés entre l’empereur et le représentant du pape suggèrent à Palamas d'écrire deux longues dissertations contre la doctrine catholique de la procession du Saint-Esprit. Il se permet, au début de la seconde, une lourde plaisanterie à l’adresse de l'ÉgFse latine, la première des Églises, qu’il compare à l'éléphant, le plus grand des animaux : ce géant, une fois tombé à terre, est inca-