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L

PALAMITE (CONTROVERSE. CONCILES DE 1341

1778

PALAMITE (CONTROVERSE). —
I. Considérations préliminaires.
II. Les faits et les documents conciliaires (col. 1778 ;.
III. Le palamisme, doctrine officielle de l’Église byzantine (col. 1793).
IV. Les principaux défenseurs du palamisme aux XIV-XVe siècles. Le palamisme mitigé (col. 1795).
V. Les principaux adversaires du palamisme. Leur doctrine sur la lumière thaborique (col. 1802).
VI. Le palamisme et l’Occident catholique (col. 1809).
VII. Le palamisme dans l’Église gréco-russe, à partir du XVIe siècle jusqu’à nos jours (col. 1811).
VIII. La controverse palamite et l’apologétique catholique (col. 1817).

1. Considérations préliminaires. —

Nous avons parlé, dans l’article Palamas, des origines lointaines et de ce qu’on peut appeler la première phase de la controverse hésychaste ou palamite. Les origines sont à chercher dans la fausse mystique qui a commencé à se glisser dans le monachisme byzantin, a peu près à l’époque où l’Église byzantine elle-même rompait les derniers fils qui la rattachaient à l’Église romaine et maintenaient tant bien que mal l’union très lâche, à laquelle on s’était habitué depuis plusieurs siècles. L’occasion prochaine a été la polémique entre Birlaam et les hésychastes athonites représentés par Grégoire Palamas. Nous avons montré comment, harcelé par la logique rigoureuse du moine calabrais, le défenseur des hésychastes avait été amené à inventer une théologie nouvelle sur l’essence de Dieu et son opération, à distinguer dans l’Être divin un élément primaire et un élément secondaire, à imaginer une lumière divine éternelle et incréée, mais réellement distincte de l’essence de Dieu. Cette première phase de la controverse, qui avait duré prés de quatre ans (13381311), se termina par le concile tenu à Sainte-Sophie de Constantinoplc. le 10 juin 1341. Ce concile, nous l’avons à peine signalé. Il est nécessaire d’en parler un peu plus longuement, car il est d’une importance capitale pour la compréhension des événements qui ont suivi.

L’histoire de la querelle, après ce concile, devient, en effet, très compliquée et passablement obscure. De purement religieux qu’il était, le débat, à partir de ce moment, revêt aussi une couleur politique. L’empereur Andronic III est mort, le 15 juin, quatre jours après le synode, laissant pour successeur un enfant. L’ambitieux Jean Cantacuzène, non satisfait de son titre de grand-domestique, veut prendre en main les rênes du gouvernement, que lui disputent l’inipératrice-mère et le patriarche Jean Calécas. Il rêve de se faire associer à l’empire, et se laisse bientôt proclamer basileus à Didymotique (26 octobre 1341). Pour mieux réussir dans ses desseins et contrecarrer l’influence du patriarche qui, peu de temps après le concile, a été obligé de sévir contre Palamas, il s’appuie sur la faction des hésychastes et sur tous les prélats mécontents. Il devient lui-même un fervent partisan de la théologie nouvelle, qu’il fera bientôt triompher par la force. Enfin, lorsqu’il est obligé de se retirer des affaires, il se mêle d’écrire l’histoire des événements dont il a été le principal artisan, et le fait avec une partialité habilement dissimulée, qui a trompé bien des historiens.

Le parti antipalamite trouve aussi son historien en la personne de Nicéphore Grégoras ; mais ce n’est pas a lui non plus qu’il faut demander un récit impartial, tellement il est atteint de la maladie de l’égocentrisme. C’est pourtant principalement sur ses dires, ainsi que sur ceux de Cantacuzène, qu’on a bâti jusqu’ici l’histoire de la controverse palamite. Cette histoire est complètement à refaire avec l’appoint des documents inédits, dont la masse énorme, conservée dans d’excellents manuscrits des" xive et xve siècles, constitue à elle seule une bibliothèque. De cette masse nous avons pu consulter des morceaux de choix, patiemment réunis par Mgr Louis Petit. Ces pièces donnent la clef de bien des énigmes, et nous révèlent par quelle voie le palamisme réussit à devenir la doctrine officielle de l’Église byzantine.

Le peu de documents publiés, les seuls qu’ont utili ses la plupart de ceux qui, jusqu’ici, se sont mêles d’écrire l’histoire de cette querelle, conseillait d’éviter les généralisations hâtives, les vues synthétiques et les constructions systématiques. Plusieurs, cependant, n’ont pas eu cette sagesse. Ils nous ont parlé soit de la lutte de deux courants philosophiques, baptisés des noms d’arislotélisme et de platonisme, ou de nominalisme et de réalisme ; soit de l’opposition de deux cultures, la culture latine représentée par Br.rlaam et ceux qui, après lui, ont attaqué Palamas, et la culture proprement byzantine que représenteraient les palamites ; soit de l’antagonisme de deux partis ecclésiastiques, le parti des moines et celui du clergé séculier ; soit enfin de la rivalité entre les adversaires de l’union avec les Latins et ceux qu’on appelait les Laiinophrones, c’est-à-dire qui avaient des tendances unionistes. De ces généralisations on peut dire qu’aucune n’est complètement vraie et qu’aucune n’est complètement fausse. Tour à tour, suivant les phases du conflit et les personnages qui y ont été mêlés, un de ces points de vue a prédominé sans que les autres aient été complètement exclus. Dans le fond, comme nous l’avons dit plus haut, à l’article Palamas, col. 1750 sq., la querelle a été avant tout d’ordre theologique. Deux méthodes pour arriver à la connaissance de Dieu et des choses divines se sont affrontées : la méthode scientifique et rationnelle, prenant ses principes tant dans les lumières de la raison que dans les données traditionnelles authentiques, représentées par la doctrine des Pères et les définitions des conciles œcuméniques, et la méthode expérimentale et mystique, prétendant arriver à la connaissance de Dieu et a l’union avec lui par les pratiques de l’ascèse et les illuminations intérieures de la grâce, et interprétant les données traditionnelles d’après l’expérience mystique. C’est pour cela que le palamisme, comme nous l’avons montré par quelques textes suggestifs, n’a pas craint de se présenter comme un développement et une manifestation de vérités implicitement et obscurément contenues dans le dépôt traditionnel. C’est ce qui explique la résistance tenace qu’il a reni outrée dans un milieu séculairement hostile à toute innovation ou développement en matière doctrinale, résistance qui n’a pu être vaincue que par l’emploi de la force brutale.

II. Les faits et les documents conciliaires. —

I. LES DEUX CONCILES DE 1341 ET LE TOME SYNODAL.

— La première question qu’il nous faut élucider, avant de poursuivre l’histoire de la controverse amorcée dans l’article précédent, est la provenance et la véritable portée d’un document, sur lequel Grégoire Palamas et ses partisans se sont appuyés pour résister ouvertement à l’autorité ecclésiastique, dès la fin de l’année 1341 et jusqu’à la déposition du patriarche Jean Calécas (février 1347). Nous voulons parler du tome synodal de 1341, ô auvoSixôç tÔiioç, qui porte dans les manuscrits d’origine palamite le titre suivant : « EuvooYx.oç xôtzoç YEypaLxjiivoç stcî tocîç èçs-’ksyï ^à.aai^ x.al à7ro6aAAO[i.svat.ç tt/v toù BapXaàix xai’AxivSûvou SuCTcéêsiav |jt, syâXai.< ; ouvoSoiç, èv alç oùj( r, ’ExxXTjaia [xàvov, àXÀà y.cà t aûyy.Ar^oc, xal oî xa60-Xtfxol TrapYJcrav tcov’Pwfxatcov xpiTat, 7rpoxo<G7 ; jjLévou xcà toù Gslotoctûu (îaaivécoç é’coç ou nepirp. » Ce titre est curieux sous plus d’un rapport. Il nous présente le document comme étant le résultat de plusieurs synodes, qui ont rejeté l’impiété de Bariaam et d’Acindyne et qui ont été réunis du vivant et sous la présidence