Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/143

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tations religieuses, la trouble et la tourmente..... »

La situation n’a pas changé : le mal signalé par Benjamin Constant ne fait qu’empirer de jour en jour, une grande catastrophe est imminente — qui vivra verra ! —[1]

L’état permanent de sourde agitation de ce pays dérive d’un vice organique, d’une constitution défectueuse. Les mots peuple suisse, nation suisse ne sont que des mots, des mots impropres qui n’ont aucun sens réel, des mots de pure convention. Il n’y a pas de peuple suisse, il n’y en aura jamais, il n’y a que des peuplades suisses qui se considèrent chacune comme des nations différentes, et ne sont unies entre elles que par un lien faible, relâché, sur le point de se rompre ; Suisse est un nom générique, voilà tout, comme celui d’Européen presque : je ne vois dans ces contrées alpestres que des Vaudois, des Genevois, des Zurichois, des Bernois, des Lucernois, etc., tous ayant leur gouvernement particulier, leurs couleurs, leurs institutions, les uns catholiques, les autres protestants, ceux-ci conservateurs, ceux-là radicaux. Sur les bords du Léman on parle français, allemand sur ceux de l’Aar, italien dans le Tessin ; de là trois Suisses bien distinctes : une française, une allemande, une italienne.

Dans notre France les frontières des trente-deux pro-

  1. Les événements de l’année 1845 confirment ces tristes prévisions.