Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les Suisses, tout démocrates qu’ils sont, aiment les titres, les distinctions, les dignités, les décorations étrangères, et savent prendre, quand il le faut, le ton et l’allure des cours, flatter la vanité des puissants, encenser les princes, acquérir de la fortune et du crédit, faire en un mot leur chemin.

Idolâtres de la patrie, ils la quittent assez volontiers pour aller former au loin des établissements durables, et deviennent sans scrupule et sans regret citoyens d’un autre pays, si toutefois leur intérêt le commande.

Naguères, si notre gouvernement eût voulu y consentir, de nombreux émigrants suisses se seraient fixés en Algérie pour coloniser toute une province, et seraient devenus par là même Français. Chez nous, plus de patriotisme réel, moins d’affectation de patriotisme. On a considérablement exagéré la prédisposition des Suisses émigrés à la nostalgie, nos voisins s’acclimatent parfaitement au delà du Jura ou des Alpes, prennent racine sur un sol étranger plus facilement qu’on ne le croit. C’est ce qui m’a toujours empêché d’ajouter foi à ces récits de désertions dans les régiments capitulés, causées par les musiques militaires exécutant le célèbre Ranz-des-Vaches ; désertions que l’on arrêta, dit-on, en proscrivant cet air des montagnes.

Temple Stanyan, ambassadeur de la Grande-Bretagne près de la Confédération helvétique, qui a laissé un