Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/286

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lieux allègres, pleins de sérénité, qui ne disent rien de leur passé sinistre, perdraient pour elle sans doute une grande partie de leurs charmes présents.


Calvin n’établit pas la Réformation à Genève, déjà révolutionnée par trois Dauphinois dont je t’ai parlé : Farel, Saunier et Froment ; mais il la disciplina, il la réglementa, il lui fit un corps de doctrine, il lui imposa des lois en un mot.

Farel et ses deux compatriotes étaient arrivés à Genève dans un moment propice, celui des grands conflits entre le principe de liberté et le principe de despotisme ; au commencement de la bataille entre les enfants de Genève, dits libertins, d’un côté, et le duc et l’évêque, de l’autre.

Un désir immodéré d’affranchissement, la lassitude des vices du clergé catholique, le besoin (pour tenir tête aux ennemis du dehors) de la protection efficace de Berne, État qui avait secoué l’autorité papale, disposaient merveilleusement les esprits à accueillir les dogmes évangéliques, mais ceux qui les apportaient ne savaient trop s’ils devaient reconnaître Luther pour chef ; obéissant à un bouillant enthousiasme, ils démolissaient avant d’avoir arrêté ce qu’ils bâtiraient, ils allaient un peu à l’aventure avec le vague pressentiment qu’une église allemande ne saurait convenir à