Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/373

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— Il n’y en a jamais eu chez nous, me dit-elle effarée, nous sommes trop pauvres... Si vous voulez aller dormir à la grange vous aurez de la bonne paille.

— Est-elle bien close ? car il fait froid ce soir.

— La paille ?

— La grange !

— Non, monsieur.

C’en était trop !... j’avais épuisé toute ma résignation pour le repas, il ne m’en restait point pour le coucher...

Je me souvins alors de ces deux vers de je ne sais plus quel ancien opéra-comique :

        Qu’on est heureux de trouver en voyage
        Un bon souper et surtout un bon lit !

Ce et surtout me sembla d’une parfaite justesse dans la conjoncture présente.

Infortuné ! je ne trouvais ni l’un ni l’autre.

Quoi ! pas même une paillasse, pas même un grabat... Excentrique et affreux village d’Yvoire ! Qu’avais-je donc fait au ciel pour qu’il m’y amenât ! Quelle absurde fantaisie d’avoir poussé jusqu’ici, quand Douvaine m’offrait plusieurs hôtels d’assez bonne figure.

Il était tombé de la neige sur les montagnes, un vent glacé soufflait du lac, je ne me sentais donc nullement disposé à passer la nuit sous un hangar ouvert à tous les vents, en compagnie de sales rustres, — un