Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/374

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

entomologiste seul eût pu y consentir par amour pour la science.

L’heure, la fatigue, la distance ne me permettant pas de rebrousser chemin jusqu’à Douvaine, j’avisai au parti que je devais prendre.

Le plus sage qui me vint à l’esprit, cher Émile, te semblera probablement un peu fou ; je le pris sans hésiter.

Il était huit heures.

Je me lève brusquement et demande ceci à l’hôtesse :

— Y a t-il dans le village de bons bateliers ?

— Oui, monsieur.

— Envoyez-en chercher un de suite, dites qu’on me l’amène sans retard.

Cela fut fait.

Je vis bientôt entrer un vieux pêcheur à cheveux blancs, mais qui me parut vigoureux.

— Approchez, mon brave homme... or ça, il s’agit de prendre votre meilleure barque et de me mener coucher en Suisse ce soir.

— Diable ! c’est bien tard[1].

— Vous serez payé en conséquence... Que demandez-vous pour la traversée ?

— Dix ou onze batz au moins, si vous voulez que je vous mène à Nyon.

  1. Je n’ai pas pris note de l’exclamation de surprise du vieux batelier, mais il est probable qu’elle fût : — Jésus ! c’est bien tard !... Ceci me semble s’accorder mieux avec la dévotion des gens de ce pays.