Page:Alfred de Bougy - Le Tour du Léman.djvu/438

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fois il arrive, par cas fortuit, que les baigneurs d’Évian dirigent leur promenade vers cette maisonnette toujours fermée, et viennent boire, à jeun, quelques verres du liquide purgatif.

Ce lieu tranquille plaît au rêveur par son abandon, son aspect mélancolique ; là les Alpes descendent en mol amphithéâtre jusqu’à la rive, et font deviner les grandioses beautés du Valais, — ce sont de petites ondulations qui annoncent de grosses ondes, — la nature se montre sévère et douce tout à la fois ; rien ne peut donner une idée de la richesse de ce sol, de la force inépuisable et luxuriante de cette végétation.

Mais pourquoi ce pays appartient-il à une race énervée, presque abrutie, ignorante, qui ne sait pas ou ne peut pas tirer parti entièrement de la fécondité d’une terre qui vaut son pesant d’or.

Les Vaudois ont eu en partage un terroir ingrat, rebelle à la culture, mais ils sont parvenus à l’améliorer, à le rendre productif ; les Chablaisiens, possesseurs d’une campagne extrêmement fertile, sont plongés dans la pauvreté.

Les Vaudois sont des vignerons ; les Genevois, des banquiers et des horlogers ; les Chablaisiens (variété du Savoyard, porteur d’eau, commissionnaire, ramoneur ou joueur de vielle en général) sont des pêcheurs ; les Valaisans, des bûcherons et des pâtres.