Page:Allais - Deux et deux font cinq (2+2=5).djvu/105

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cependant que le canard interpellait le loup : Mon petit loup.

Tout compte fait — et surtout pour faire cesser toute plaisanterie qui a trop longtemps duré — nos voisins n’étaient, zoologiquement parlant, ni un loup, ni un canard.

Ils étaient évidemment des amoureux et sans doute des néo-conjoints.

Bientôt, je m’endormis au roucoulement de cette pseudo-ménagerie disparate, et au petit jour, je fus éveillé par des mon petit loup et des mon gros canard sans fin.

— Ils doivent être gentils, ces petits-là ! pensai-je.

Et des jours s’écoulèrent.

… Samedi dernier, nous nous trouvions à Nice dans un restaurant :

À une table tout près de la nôtre vinrent s’asseoir un monsieur et une dame qui ne suscitèrent point, tout d’abord, notre intérêt.

Mais quand nous entendîmes :

— Encore un peu de langouste, mon petit loup ?

— Volontiers, mon gros canard !

Vous concevez d’ici notre joie !

Avoir sous la main un petit loup et un gros canard qu’on avait considérés jusqu’alors comme l’apanage exclusif de la chimère ! Pouvoir les contempler, les frôler peut-être !

Et nous contemplâmes !

Un penseur doublé d’un écrivain a exprimé un