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bien même ils n’ont pas l’éducation religieuse ou politique, éveillent heureusement les forces de leurs semblables ; le plus souvent chétifs de corps, s’ils marchent avec une ambition démesurée, avec la cruauté ou l’inconséquence, ils ne se font suivre des hommes qu’en appelant à la noblesse du courage et de l’admiration. Si trop souvent la mort et la terreur marchent avec eux, les qualités aussi qui rendent l’homme invincible marchent avec eux : par des signes visibles nous voyons Dieu remettre l’homme aux mains de l’homme.

Cette jeunesse qui suivait l’Empereur au combat, née maintenant sous d’autres influences, dirige la presse l’épée à la main, ou bien se jette dans une littérature corrompue, ou s’adonne aux métiers paisibles et subalternes. Le trait qui la caractérise est l’ignorance ; de là, l’égarement de sa générosité, des convictions légères, proclamées et abandonnées. S’il était bien reconnu que la première preuve de la capacité est le savoir, on ne verrait pas tous ces grands hommes de 25 ans, dont la vie est si misérable. L’égalité les appelle et les corrompt ; la vanité et non la vertu les convie, et leur médiocrité est le juste châtiment dû à leur médiocrité. Ne les accusons pas, leur cœur est généreux, la société les perd, rien ne leur est offert qui les soutienne ; tout à l’heure l’admiration les tenait soumis, et nul sous l’Empereur ne s’est cru l’Empereur ; ces mille Napoléon nés depuis font bien voir que Napoléon manque. Qui ne connaît la bravoure des élèves de droit, de médecine, des écoles militaires ; qui doute de l’honneur de ces jeunes gens ? Trouverait-on de meilleures armées ? Qui n’a vu avec attendrissement l’amour de l’humanité s’éveiller chez eux ? Leur tort est celui d’une démocratie sans direction et sans chefs : le mérite obtient moins d’honneur que l’intrigue ; ceux qui veulent relever la pauvreté restent à l’écart, les fri-