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LÉGUMES. — CHICORÉES

Chicorée sauvage. — Cichorium Intybus, Linné.

La Chicorée sauvage, vivace, qu’on cultive comme légume, salade, fourrage, et pour les racines, servant de café, croît dans toute l’Europe, excepté la Laponie, dans le Maroc et l’Algérie[1], de l’Europe orientale à l’Afghanistan et le Bélouchistan[2], dans le Punjab et le Cachemir[3], et de la Russie au lac Baïkal en Sibérie[4]. La plante est certainement spontanée dans la plupart de ces pays ; mais, comme elle croit souvent au bord des chemins et des champs, il est probable qu’elle a été transportée par l’homme en dehors de sa patrie primitive. Ce doit bien être le cas dans l’Inde, car on ne cite aucun nom sanscrit.

Les Grecs et les Romains employaient cette espèce, sauvage et cultivée[5] mais ce qu’ils en disent est trop abrégé pour être clair. D’après M. de Heldreich, les Grecs modernes emploient sous le nom général de Lachana, comme légume et salade, dix-sept Cichoracées différentes, dont il donne la liste[6]. Selon lui, l’espèce ordinairement cultivée est le Cichorium divaricatum, Schousboe (C. pumilum, Jacquin), mais il est annuel, et la Chicorée dont parle Théophraste était vivace.

Chicorée Endive. — Cichorium Endivia, Linné.

Les Chicorées blanches, Endives ou Scarole, des jardins, se distinguent du Cichorium Intybus en ce qu’elles sont annuelles et d’une saveur moins amère. En outre, les lanières de leur aigrette au-dessus de la graine sont quatre fois plus longues, et inégales, au lieu d’être égales. Aussi longtemps qu’on comparait cette plante avec le C. Intybus, il était difficile de ne pas admettre deux espèces. On ne connaissait pas l’origine du C. Endivia. Lorsque nous reçûmes, il y a quarante ans, des échantillons d’un Cichorium de l’Inde appelé par Hamilton C. Cosmia, ils nous parurent tellement semblables à l’Endive que nous eûmes l’idée de voir l’origine de celle-ci dans l’Inde, comme on l’avait quelquefois supposé[7] ; mais les botanistes anglo-indiens disaient, et ils affirment de plus en plus, que la plante indienne est seulement cultivée[8]. L’incertitude continuait donc sur l’origine géographique. Dès lors, plusieurs botanistes[9] ont eu l’idée de comparer l’Endive avec une espèce annuelle, spontanée dans la

  1. Ball, Spicilegium Fl. marocc., p. 534 ; Munby, Catal., éd. 2, p. 21.
  2. Boissier, fl. orient., 3 p. 715.
  3. Clarke, Compos. ind., p. 250.
  4. Ledebour, Fl. ross., 2, p. 774.
  5. Dioscorides, II, cap. 160 ; Pline, XIX, cap. 8 ; Palladius, XI, cap. 11. Voir d’autres auteurs cités dans Lenz, Botanik d. Alten, p. 483.
  6. Heldreich, Die Nutzvflanzen Griechenland’s, p. 28 et 76.
  7. Aug. Pyr. de Gandolle, Prodr. 7 p. 84 ; Alph. de Candolle, Géogr. bot. p. 845.
  8. Clarke, Compos. ind., p. 250.
  9. De Visiani, Flora dalmat., II, p. 97 ; Schultz, dans Webb, Phyt. canar., sect. II, p. 391 ; Boissier, Fl. orient., III, p. 716.