Page:Amable Floquet - Anecdotes normandes, deuxieme edition, Cagniard, 1883.djvu/285

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d’une voix contre la dure sentence de son bailliage.

Restait, maintenant, au Parlement à s’expliquer sur cette transgression flagrante, publiquement confessée par les juges ses inférieurs, de la loi la plus claire et la plus précise qui fût écrite dans ses codes ; à choisir entre la jurisprudence du bailliage de Rouen et celle des six autres bailliages de la province, entre l’équité et le texte le plus formel qui fut jamais. À lui, en cette solennelle conjoncture, d’agir, non plus en cour de justice qui applique des dispositions législatives auxquelles elle-même est subordonnée, mais en souverain sénat qui établit et proclame des règles auxquelles tous les juges d’un pays devront désormais obéir. À lui, en un mot, ce jour-là, non plus d’appliquer la loi, mais de la faire. — Peuple, légistes, étaient là dans l’attente, jamais cause pareille n’ayant été vue au palais ; mais les esprits, maintenant, étaient bien changés ; les avocats, à cette fois, entouraient tous Brétignières ; et leurs félicitations unanimes et chaleureuses lui faisaient bien augurer de l’issue de ce procès, si téméraire, quelques heures avant, au gré de la plupart.

Le Parlement, cependant, retiré dans le secret du conseil, y tardait plus que d’ordinaire ; jamais délibération n’avait été si longue, et déjà dans la salle d’audience on ne savait plus que penser. C’est qu’hélas !