Page:Amable Floquet - Anecdotes normandes, deuxieme edition, Cagniard, 1883.djvu/336

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pleurait cette autre et immense famille de la morte, que son inépuisable charité lui avait donnée.

Mais chez tous l’indignation s’exhalant avec la douleur, « quel monstre (se demandait-on) a pu abréger une vie si chère et envier à une vieillesse si avancée le peu de jours qui devait lui rester encore ? » Deux hommes, deux femmes, attachés au service de madame de Brothonne, la pleuraient, se lamentaient à l’envi de sa famille ; et il fallait que ces quatre serviteurs eussent bon renom dans la ville, pour qu’en une telle perturbation, en un si violent déchaînement de tant d’esprits émus, de tant de cœurs remplis d’horreur et de colère, aucune voix ne se fût élevée contre eux. Le moyen, au reste, d’imputer la mort d’une telle femme à qui avait vécu près d’elle, à qui avait pu la connaître, à qui seulement avait pu la voir ! Après donc que ces quatre serviteurs avaient été si longtemps heureux par leur bonne maîtresse, sa mémoire les protégeait encore, aujourd’hui qu’elle était dans la tombe !

Qui, cependant, pouvait avoir consommé un attentat si noir ? C’était le cri de toute cette grande ville, le cri de la justice indignée, qui, laissant là aussitôt tout autre soin, pour poursuivre le coupable, déployant une activité, une énergie d’investigation qu’on ne lui avait vues jamais, veillait, cherchait, s’enquérait, interrogeait incessamment, s’évertuant tout le