Page:Amable Floquet - Anecdotes normandes, deuxieme edition, Cagniard, 1883.djvu/337

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jour, et ne se reposant pas la nuit, sans toutefois, pouvoir obtenir le plus faible résultat.

C’était au temps du Conseil supérieur, qui, succédant avec défaveur à l’antique et regretté Parlement de Normandie, qu’avait anéanti Maupeou, aurait voulu, par quelque action signalée, se concilier les sympathies que tous lui déniaient à l’envi, et, par l’éclatant déploiement d’une juste rigueur, contraindre enfin au sérieux et au respect un monde passionné, méprisant et railleur, auquel, depuis un an, il avait servi chaque jour de jouet et de risée.

La justice, donc, veillait, interrogeait, épiait autour d’elle, promenant avidement çà et là ses pénétrants et soupçonneux regards. Au bailliage, au palais, dans la ville, on n’entendait plus que sa voix formidable ; elle retentissait jusque dans les églises ; dans toutes, du haut de la chaire, par la bouche du prêtre, elle conviait à révélation, sous des peines redoutables, tout mortel pouvant avoir quelque notion, si légère qu’elle fût, sur un crime que tous détestaient, dont il tardait de connaître enfin l’exécrable auteur. Et, à cette voix menaçante de la Justice et de l’Église, à ces appels qui avaient retenti au loin avec éclat, avec empire, ne répondant toujours qu’un universel et profond silence, après que, soixante-dix jours durant, on se fut épuisé en inquiètes et inutiles recherches, si la Justice, éper-