Page:Amable Floquet - Histoire du privilege de saint Romain vol 2, Le Grand, 1833.djvu/596

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et parmi ceux qui travaillèrent sur les métaux, on distingua le moine Tutilon, qui fut à Metz employer ses talens comme ciseleur et sculpteur.

S’il est difficile d’accorder aux orfévres qui vécurent dans des tems fort reculés, une grande habileté comme figuristes, les châsses qui sortirent de leurs mains n’en étaient pas moins remarquables sous le rapport du caractère, de la disposition de leur ensemble, et surtout de la délicatesse de leurs ornemens. Quant à celles qui comportaient des formes architecturales, c’était dans les monumens religieux de leur époque que les vieux émules de saint Éloi puisaient fidélement les types de leurs chefs-d’œuvre ; ainsi, d’après cette règle immuablement observée par eux, on pouvait, en France, il y a quarante ans, en visitant le trésor[1] des églises métropolitaines et des splendides abbayes, se rendre à peu près compte de l’âge de ces châsses par celui des édifices avec la construction desquels la leur offrait une analogie remarquable.

L’orfévrerie religieuse, s’il m’est permis de la distinguer ainsi, suivit donc pas à pas l’architecture, dans ses grandes révolutions comme dans ses moindres phases, et les formes de l’édifice gigantesque de pierre se reproduisaient dans les arceaux délicats du reliquaire, ornement précieux de l’autel, soit que le plein-cintre se maintint encore dans sa longue domination, soit qu’il eût été banni par l’ogive. Dans ces deux arcs résident, en effet, les traits les plus caractéristiques et les plus tranchés des monumens du moyen-âge ; car, bien que subissant d’assez nombreuses variations, le dernier surtout, jamais ils ne cessèrent d’être les élémens constitutifs des deux

  1. On se rappelle que c’est ainsi qu’on désignait le lieu où l’on tenait renfermés les vases sacrés et les autres objets précieux appartenant aux églises. On le nommait en latin diaconicum, parce que la garde en était spécialement confiée aux diacres ; celui d’entre eux qui se trouvait chargé de veiller à la conservation des châsses portait le titre de feretrarius, et en français, assez ordinairement, celui de sainturier.