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L’ATELIER D’INGRES.

dont M. Ingres avait l’habitude de se servir sont de peu de durée, la lumière tend à les absorber ; l’huile au contraire jaunit, et ses peintures anciennement faites, en perdant leurs tons violacés et en prenant une teinte dorée par l’action du temps sur l’huile, ont gagné, sinon comme couleur, du moins comme aspect général. Cela était bien sensible à l’exposition où figurèrent les deux portraits dont je parle. Celui de madame de Vaucey avait l’apparence d’un portrait d’ancien maître, et sa patine faisait contraste avec les tons un peu crus de celui de M. Bertin.

Lorsque mon œil se fut fait à ce premier aspect, qui, je l’avoue, me déplut, je ne saurais dire l’admiration que firent naître en moi la beauté et la puissance de cette tête de vieillard. Tout me parut merveilleux ; l’exécution, pour moi commençant, fut une énigme. Je restai ébloui, et ne pus ouvrir la bouche. Que pouvais-je dire en effet ?

Un monsieur, que je ne connaissais pas, invité comme nous l’avions été, mes camarades et moi, moins modeste ou plus sûr de lui, se lança dans des compliments, fort gênants toujours pour l’homme qui les reçoit en pleine figure ; mais il eut le tort d’aller un peu loin, et je n’oublierai jamais l’expression indignée de M. Ingres, quand ce Monsieur lui dit : « Je ne crois pas que Ra-