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L’EXPOSITION DE 1834.

nous mettons quatre (et il faisait semblant de la soulever, en se relevant comme un homme essoufflé), et nous ne pouvons pas. »

Cela me rappelait Homère disant déjà des pierres que lançait Diomède :

« Le fils de Tydée prend dans sa forte main une pierre d’un poids énorme, telle que deux hommes de ceux qui maintenant respirent ne pourraient la porter ; seul, il la soulève… »

Je ne sais comment cette idée me revint quand je voulus faire une étude peinte ; toujours est-il que j’imaginai un jeune berger prêt à se baigner, et découvrant sur le bord du ruisseau un bas-relief antique, qu’il regarde avec admiration.

J’éprouvai plus que jamais le désappointement dont j’ai déjà parlé, à l’aspect de ma petite figure, perchée très-haut, et dont la dimension était amoindrie par le voisinage d’une figure colossale peinte par Ziegler. Je ne puis me rappeler sans sourire l’espèce de colère que mon camarade me témoigna de ce voisinage : « Votre figure rend la mienne ridiculement grosse, me dit-il. » Il ne s’occupait pas le moins du monde du tort que la sienne pouvait me faire. Ces explosions d’égoïsme étaient si naturelles, si franches, qu’il n’y avait pas moyen de les lui reprocher.

Au changement qui eut lieu au bout d’un mois, je me trouvai placé dans le grand salon,