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L’ATELIER D’INGRES.

ses fresques, tous ces grands maîtres dont je ne connaissais que les noms, ces peintures que je voyais merveilleuses à travers les descriptions un peu froides de Valery. Aussi, je ne pus résister longtemps au désir d’admirer par mes yeux toutes ces belles choses. M. Ingres était désigné comme successeur d’Horace Vernet à la direction de l’École de Rome ; Hippolyte Flandrin était parti avec les honneurs du grand prix : je fis à la hâte tous mes préparatifs, et, quelques jours avant mon départ, ma sœur réunit tous mes amis dans un dîner d’adieux.

Si je rappelle cette circonstance, c’est que M. Thiers se trouvait à ce dîner. Il était alors ministre, de l’intérieur, je crois, mais à coup sûr ministre, car, avant de se mettre à table : « — Vous allez en Italie, me dit-il, votre maître aussi ; il est nommé directeur de l’École. Dites-lui donc de ma part que si, au lieu de faire des tableaux comme le Saint Symphorien, il veut copier les Chambres de Raphaël, je lui allouerai tout ce qu’il me demandera. »

Je devins rouge, et je lui répondis : « Ma foi ! monsieur Thiers, j’aime mieux que vous chargiez un autre que moi de la commission. »

Je dus l’étonner. Il paraît, du reste, qu’il savait alors que Raphaël n’avait pas fait que des vierges.

Cette idée que m’avait exprimée M. Thiers,