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L’ATELIER DES ÉLÈVES.

ajouter bien peu à cette somme. Eh bien ! j’oserais répondre que ce jeune carabin pouvait être sûr de la fidélité de cette jeune et jolie fille, qui venait tous les jours se montrer nue à quarante ou cinquante jeunes gens. Et elle n’était pas une exception. Je parle toujours de mon temps.

Je ne veux pas m’étendre sur ce sujet plus qu’il ne faut. Je voudrais cependant dire quelques mots encore d’un fait qui me revient en mémoire, et dont j’ai été témoin. Ce fait que j’ai raconté aux frères de Goncourt, et qu’ils ont cité dans un de leurs romans, prouvera d’une manière bien évidente, je crois, à quel point inouï nos modèles, dans l’exercice de leur métier, peuvent cesser de nous envisager comme des hommes, pour ne plus voir en nous que des artistes au travail.

Une jeune fille de seize ans, tout à fait charmante, posait à l’atelier. Nous étions trente, à peu près, à travailler d’après elle. Je vois encore la pose, et je retrouverais l’étude que je me rappelle avoir gardée.

Nous entendons tout à coup pousser un cri ; nous voyons cette jeune fille se jeter en bas de la table du modèle, prendre tous ses vêtements, sous lesquels elle se cache à la hâte comme elle peut, et nous ne comprenons la cause