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son aux mœurs dans la société politique conduisit les Romains à conférer au censeur des pouvoirs qu’à juste titre nous jugerions exorbitants. Qu’il pût chasser un sénateur du sénat et un chevalier de sa tribu, rien de mieux, et de telles épurations, si elles étaient possibles, seraient parfois fort nécessaires ; que le mauvais traitement des esclaves fût châtié, rien de mieux encore ; mais les censeurs punissaient d’ignominie des fautes privées sur lesquelles il n’appartient qu’à la conscience de prononcer et non pas à l’État, parce que l’État n’a pas l’infaillibilité de la conscience ; ils punissaient, ce qui est plus grave, des actes irrépréhensibles et dont personne n’a le droit de demander compte au citoyen : le choix d’une profession, comme celle de petit marchand ou d’acteur ; les arrangements de la vie privée, comme la préférence donnée au célibat sur le mariage.

C’était là une véritable tyrannie et une tyrannie tracassière à laquelle les Romains se soumettaient, et pourtant ils avaient plus le sentiment de la liberté que tels hommes qui demandent seulement au pouvoir absolu de n’être point tracassier.

Ils ne refusaient rien au despotisme de la loi, mais n’en voulaient supporter aucune autre.

Ce n’était pas assez sans doute.

La législation ne doit pas être oppressive, et la liberté d’un citoyen ne doit avoir d’autres restrictions que la protection de la liberté des autres citoyens.