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parle que d’elle, on ne songe qu’à elle, on ne s’en prend qu’à elle, on n’accuse qu’elle, lui rendant hommage même par les injures qu’on lui adresse. Presque tous la disent volage, aveugle, mobile, inconstante, incertaine, changeante, et favorisant ceux qui n’en sont pas dignes, indignorumque fautrix.

Pour Ptutarque[1] il déclarait qu’en entrant à Rome elle avait quitté ses ailes, ôté ses souliers, déposé le globe toujours tournant qui était sur, sa tête. Cependant l’instable Fortune n’y était pas encore fixée ; elle n’avait pas épuisé sa mobilité. Elle semble depuis avoir repris ses ailes, remis ses souliers et replacé sur sa tête son globe tournant, lequel tourne encore.

Le culte de la Fortune était la vraie religion du peuple romain. Sous ce nom, il se représentait l’intervention d’une puissance inconnue dans toutes les circonstances, dans tous les actes de la vie, et les divers aspects que cet inconnu, espéré ou redouté, pouvait offrir à l’imagination.

Chaque chose avait sa Fortune. Dans les classes de la société, il y avait la Fortune des patriciens, des chevaliers, des plébéiens, des familles ; il y avait la Fortune des Tullius, des Flavius, de ceux qui portaient le même surnom, des Torquatus ; il y avait la Fortune des bains, la Fortune des greniers.

Les cohortes avaient leur Fortune.

  1. De Fort. Rom., 4.