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LA SIGNORA CHIARA

ses clientes étendues dans la plus vaste, la plus boiteuse, la plus gémissante et la plus crasseuse chaise longue qui se puisse voir en aucune ville maritime de l’univers. C’est un homme de taille exiguë, au visage plein, avec de petits yeux verts et un long nez descendant sur une bouche sinueuse, et dont les épaules rondes, le ventre pointu et les jambes grêles rappellent l’antique atellane.

Giacomo épousa sur le tard la jeune Chiara Mammi, fille d’un vieux forçat très estimé à Naples qui, s’étant fait boulanger sur le Borgo di Santo, mourut pleuré de toute la ville. Mûrie au soleil qui dore les raisins de Torre et les oranges de Sorrente, la beauté de la signora Chiara s’épanouit dans une florissante splendeur.

Le professeur Giacomo Tedeschi croit décemment que sa femme est aussi vertueuse qu’elle est belle. Il sait d’ailleurs combien est fort le sentiment de l’honneur féminin dans les familles des bandits. Mais il est médecin