Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre.djvu/140

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louanges à la Providence. Longuemare lui répondit que la nature est le théâtre d’un éternel carnage et que rien n’y vit que par le meurtre.

— Vous allez trop loin, répliqua M. Fellaire.

Ils étaient heureux tous trois ; l’ombre commençait à les envelopper. Ils se seraient longtemps oubliés là, si l’homme d’affaires n’eût songé au café de Colmar. Il calcula qu’il était temps d’aller y faire sa partie de billard, avec des courtiers et des fermiers d’annonces.

— Mes enfants, dit-il en consultant sa montre non sans un froncement de ses épais sourcils, l’heure me presse ; un rendez-vous très important. D’ailleurs, il va pleuvoir.

Le vent s’était élevé. Des nuages couraient furieusement dans le ciel, devant une lune pleine et rouge qui semblait emportée en sens contraire. Ils cherchaient le sentier étroit qui monte au haut Meudon et mène à la station. Hélène marchait au bras de René. Les clartés incertaines de la nuit les faisaient hésiter. Ils se taisaient. Tout à coup Hélène frissonna.

— J’ai peur, dit-elle.

Un homme en guenilles, grand, maigre, à longs