Page:Anatole France - Jocaste et Le Chat maigre.djvu/178

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cha d’une porte bâtarde, noircie par des mains grasses, et s’avança dans la salle en boitant. Monsieur Godet-Laterrasse fit au patron du restaurant son salut en arrière.

— Bonjour, monsieur Godet, dit l’homme gras. Voilà un bien mauvais temps, et qui fait beaucoup de mal ! À propos, monsieur Godet, si vous pouviez demain me donner un petit acompte, vous me feriez plaisir. Je ne suis pas homme à vous tourmenter, vous le savez bien ; mais j’ai un fort paiement à faire cette semaine.

Monsieur Godet-Laterrasse répondit avec un accent à la fois oratoire et enfantin et sans prononcer les r, qu’on lui devait de l’argent, qu’il irait sans faute, le lendemain même, chercher une somme quelconque chez son éditeur ou au journal, qu’il ne savait vraiment pas comment il avait pu oublier la note du restaurateur, et que c’était une bagatelle.

L’homme gras ne parut pas ébloui par cette promesse. Il reprit d’un ton dolent :

— Ne m’oubliez pas, monsieur Godet. Bonsoir, monsieur Godet.

Et monsieur Godet-Laterrasse entra à son tour